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Non j'déconne ! Détends ton slip, relâche tes sphincters (pas trop quand même) et prend donc un verre de grenadine à ma santé ! Nous allons parler de ces quelques menus travaux sous l'angle de la bonne ambiance et de la franche camaraderie. Expression de joie.
Toutefois je te vois tressaillir avec la même fièvre devant la perspective de me voir blablater sur mon travail, malgré ce verre de grenadine. Soit. Je m'en vais te masser les neurones avant que ceux-ci ne fondent devant ce qui - je te le concède - pourrait te paraître de prime abord quelque peu what the fuckesque.
Zou !
Tu vas pas te plaindre quand même ?
C'est peut être l'occasion, pour ceux qui se posent la question, de comprendre ce qu'on y traficote dans ces écoles. Puisque moi-même, avant d'y entrer, je n'en avais qu'une vague idée.
Ouvre grand tes mirettes jeune étudiant en prépa art, et toi aussi papy qui essaie de comprendre ces camps de dégénérés.
La première année de Beaux Arts est une année charnière qui permet à l'étudiant d'explorer et d'appréhender un peu tout ce qui ce fait en art pour qu'il puisse faire sereinement le choix de sa spécialité en seconde année (ou de jarter comme un cloporte s'il n'a pas eu le bon sens de ce bouger un peu les fesses).
Ici à Toulouse, on aborde allègrement :
- La couleur
- Le dessin
- La gravure
- La sérigraphie
- Le volume
- La performance
- La photo
- La vidéo
- Le dessin numérique
- L'histoire de l'art
- L'histoire du cinéma muet
- La philosophie
- La méthodologie (pour apprendre à parler de son travail)
- La méthodologie de la recherche (ça c'est pour apprendre à bien bien chercher des trucs sur l'internet, et être sûr, vraiment vraiment sûr que les sources sont sérieuses. Voilà voilà.)
On aborde aussi des cours plus singuliers, conduits par l'excellente, humainement et pédagogiquement, Valérie Du Chéné (un peu de pub au passage, je touche une commission*). Ces cours sont davantage des ateliers de mise en pratique plastique au travers d'un process expérimental. (mais que me raconte-t-il celui là ?) Voilà plutôt :
- Ondes à sonder : atelier qui met en relation le travail du son et du dessin. J'entends quelque chose, je dessine quelque chose.
- Tomber dans l'espace : L'occasion de trouver son propre vocabulaire d'expression pour représenter l'espace.
- Les films ne poussent pas dans les arbres contrairement aux bananes qui mûrissent au soleil : ouai je sais... vous vous êtes dit "mais que diable font ces gens dans cet endroit sordide ?". Rassurez-vous, c'est plutôt cool en fait. Pour la petite histoire, cette phrase a été dite par Jean-Louis Comolli lors d'une conférence sur le cinéma à Lagrasse en 2012. Dans cet atelier, on visionne un film en entier, selon une sélection de Valérie, et nous devons dessiner ce film, à notre façon.
Voilà qui vous donne un bref aperçu de ce qu'on fait de nos journées qui, contrairement à ce que croient les mauvaises langues, sont bien remplies. Et ouai, tu pensais qu'on passait notre temps à boire des bières et faire des concours de pets ? Je t'offre une grenadine pour te consoler va.
De mon point de vue, les Beaux Arts c'est un peu comme Poudlard. C'est autant de magie, le Quidditch en moins.
Prêt pour la suite ?
Une grenadine ?
La big installation que vous voyez là est un travail qui concerne le cours de Volume et qui répond au sujet sur l'informe et le fétiche contemporain. Sous cet intitulé qui peut faire un peu peur, il s'agit en fait d'une initiation à la sculpture contemporaine. Partir de peu, des matériaux simples, et arriver à construire du sens.
Et là vous me dites : "C'est pas faux"
Attends deux secondes, médisant personnage, la suite arrive :
Le mien m’a conseillé de me la jouer archéologue, façon Indiana Jones, hop, direction médiathèque ==>
Après, il s'agissait de se lancer (pas physiquement hein) dans la réalisation. Honnêtement, je ne savais pas trop quoi faire... Ces bouts de bois étaient déjà très esthétiques, j'avais dans l'intention d'intervenir dessus comme le font les féticheurs, quand soudain ma professeur surgit de l'ombre pour m'avertir de l'erreur sémantique que j'allais commettre (imaginez la scène où Gandalf fait les gros yeux à Bilbon au début du Seigneur des Anneaux. Les choquottes, les vrais).
"Tu t'apprêtes à reproduire ce que d'autres ont déjà fait sans y apporter ton propre point de vue. Ce serait dommage. Concentre toi plutôt sur l'acte de création"
Diantre, c'est pas faux...
En considération de ces sages paroles, j'ai tenté de distiller un des gestes forts du processus créatif des féticheurs, et j'ai choisi la ligature par accumulation. C'est ce qui - à mon sens - revient le plus souvent dans la pratique vaudou. Et là vous vous dites tout naturellement "Mais pourquoi diable n'as tu pas usé de tout le cortège d'accessoires qui sied tant à cette pratique occulte ?".
Vous êtes drôlement observateur dis donc !
C'était un peu le piège de mon projet. Les clous, cadenas, miroirs, enduits sacrificiels, et j'en passe et des meilleurs, sont des objets déjà bourrés de symbolique, et même pour les plus avisés, il est toujours délicat de jouer avec les icônes, symboles et autres signes ostentatoires.
Bon, avec tout ça, fallait quand même commencer à bosser. Let's do it !
J'ai accroché, enroulé, ligaturé, attaché, suspendu, au début un peu au hasard, puis petit à petit j'ai donné une forme, une cohérence.
Cette suspension en l'état ne me suffisait pas. J'ai laissé mûrir l'idée pendant quelques temps, je cogitais…
Et d’un coup d’un seul, je me suis souvenu d’un évènement marquant datant d’un voyage en pays hispanique (trépidant n’est ce pas ?). En effet, un voyage à Barcelone où j’ai pu visiter la maison d’Antoni Gaudí, l'architecte espagnol à qui on doit notamment le parc Güell, des architectures étonnantes et surtout la Sagrada Familia. Dans cette maison, on peut justement découvrir comment Gaudi s’y est pris pour réaliser la maquette de ce monument hors du commun. Images :
De fait, comme ma structure comportait les mêmes caractéristiques techniques (cordages, bois suspendus faisant office de poids et forme pyramidale inversée), je me suis mis en quête de dégoter un miroir suffisamment grand pour refléter la totalité du volume, et ce, sans dépenser un centime.
Oui… je te l’accorde… c’était une quête relativement hardcore… Mais c'était sans compter mon infâme fourberie, et mon talent pour la furtivité, niark niark niark.
J’ai guetté une semaine durant le moindre mouvement de troupe, dérobé la liste des affectations, il ne me manquait qu’une chose. Une équipe. J’ai fait appel à Julie. Nom de code : Kakino sensei. Maitresse des arts martiaux, elle maitrise parfaitement la subtilisation d'objets encombrants et est capable d’intervenir en terrain hostile quelque soit le nombre des opposants.
J’avais tout ! Le fond, la forme, il ne me suffisait plus que d’installer tout ça, bien propre, et de prendre quelques photos, que voici :
Voilà qui conclut ce premier article ! J'espère que vous aurez autant de plaisir à le lire que j'en ai eu à l'écrire.
Vos réactions, commentaires, indignations, orgasmes et autres facéties m'intéressent, n'hésitez pas à m'en faire part :)
A bientôt !
* C'est pas vrai...